dimanche 7 février 2021

 Rapport sur la mémoire : Deux visions, une seule approche !




Le 24 Janvier 2021 aura marqué un événement majeur pour tous ceux qui s’intéressent au dossier de la guerre d’Algérie qu’ils soient Algériens ou Français avec la remise du rapport sur la mémoire, tant attendu, par le célèbre historien Monsieur Benjamin Stora, - présenté par ses pairs comme un grand spécialiste de l’Algérie.  L’importance dudit rapport est d’autant plus importante considérant les longues années d’attente d’une partie des citoyens des deux pays pour une solutions aux multiples points laissés en suspens depuis l’indépendance par les deux anciens belligérants.

Bien que la commandite, par la présidence de la république française, soit un rapport consultatif et ipso-facto en aucun cas, du moins selon les premières indications, une décision politique finale, ce dernier a comme prévu déchaîné les passions des deux côtés de la Méditerranée, remettant au gout du jour un vieux dossier, jamais clos, ravivant pas la même occasion de vielles blessures jamais guéries malgré les années qui se sont écoulées depuis la fermeture du chapitre de la guerre d’Algérie.

A l’instar de beaucoup de mes compatriotes de l’intérieur et de la diaspora, je n’ai pu rater le traitement de cet évènement par la presse nationale en premier lieu.

Je voulais revenir sur le traitement de cette épineuse question dans les relations des deux pays par les pouvoirs publiques Algériens. D’emblée, on a tous remarqué le choix du président de la république en la personne de Monsieur Abdelmadjid Chikhi en sa qualité de conseillé a la présidence, et ancien combattant de la guerre de libération, chargé des archives et de la mémoire. Monsieur Chikhi a la réputation d’être un conservateur a tout ce qui touche à la souveraineté nationale et aux archives nationales détenues par la France. Du côté Français, on a opté pour un imminent historien réputé être un grand spécialiste de la guerre d’Algérie.

D’un point de vue pratique et pragmatique, je trouve que le fait de charger ses deux personnalités de ce projet sensible est comme condamner cette entreprise a l’échec dans son état embryonnaire : Nul doute que les deux personnalités ont toutes les compétences requises pour cette entreprise, mais leur implication directe et respective dans la question ne peut leur conférer la neutralité nécessaire pour un traitement objectif et pragmatique de la question. En effet, monsieur Chikhi ayant participe a la glorieuse guerre de libération, et monsieur Stora étant un pied noir ne peuvent, et c’est tout a fait naturel, avoir la lucidité et le détachement nécessaire pour faire sortir un rapport qui va dans le sens d’une résolution objective et surtout tourné vers l’avenir des relations entre les deux pays sur la question.

La nomination de ces deux personnalités nous renvoie à la question de savoir si la volonté politique au sommet de l’état des deux pays : Si l’on considère que réellement les deux pays veuillent aller vers un nouveau chapitre sur la question, on aurait dû assigner cette tache a des spécialistes nés après l’indépendance qui pouvaient avoir un regard neutre et objectif sur toute la question. Charger des personnes directement impliquées dans ce volet dénote une volonté politique pour bâcler cette question.

Le rapport en question semble en décalage avec certains points cardinaux de la question que la majorité des médias ont passé sous silence ; On nous référant aux accords d’Evian, on se rencontre d’emblée que les recommandations dans le rapport de Monsieur Stora est en porte a faux avec les accords d’Evian surtout en ce qui concerne la question des Harkis et des compensations. Alors que le rapport place la question du droit de retour des Harkis dans leur pays natal, la partie Algérienne place cette question comme  une option tabou irréalisable s’inscrivant dans les constantes du fondement même des principes de l’Algérie indépendante.

D’un autre côté, les divergences entre les deux parties semblent insurmontables si l’on considère l’approche et la notion des deux anciens belligérants du fait colonial : Alors que la France est foncièrement convaincue que le fait colonial en général, et en Algérie en particulier a été un événement libérateur, émancipateur, civilisationnel, l’Algérie en contre partie considère la présence de la France en Algérie comme une agression, une colonisation qui a causé le retard a tous les niveaux, l’asservissement,  et la misère  des populations locales, et de ce fait on arrive a la conclusion que la divergence des visions insurmontables pour arriver a un règlement sérieux. Ce constat nous impose la question de savoir si réellement les pouvoirs publics des deux pays ont un désir et une volonté politique réel et sincère pour un règlement juste  et équitables pour les deux parties sans exclusions.

Pour conclure, on est toujours en attente d’une réaction de la part de la partie Algérienne sur le rapport de Monsieur Stora. Tous les Algériens ne comprennent toujours pas le silence de Monsieur Chikhi quant au contenu de Monsieur Stora ce qui soulève pas mal de questions.

On souhaiterait que cette question soit réglée pour que les relations de l’Algérie avec la France soit d’égal a égal dans le cadre du respect mutuel en deux nations souveraines.

Salah-Eddine Chenini